avenir d'une offensive

 

Chronologie Égypte

Samedi 1er janvier 2011

Alexandrie : attentat devant une église copte, 21 tués, entre 70 et 100 blessés, « pire attentat contre la minorité chrétienne depuis une décennie » ; au cours des heures qui suivent, accrochages entre « chrétiens » et « musulmans » puis plusieurs centaines de jeunes s’affrontent avec les flics, jets de pierres et de bouteilles vs lacrymos et balles en caoutchouc

Le ministre de l’intérieur déclare qu’il s’agit d’un attentat suicide impliquant « probablement » des éléments étrangers, sous-entendu la branche iraquienne d’Al Qaeda qui aurait proféré des menaces contre les chrétiens égyptiens quelque temps auparavant

Dimanche 2 janvier

Le Caire : rassemblement de plusieurs centaines de personnes dans une cathédrale, les manifestants s’en prennent aux « officiels » venus présenter leurs condoléances, caillassage d’un secrétaire d’Etat, affrontements entre « chrétiens » et flics, 45 flics blessés (bilan officiel) ; plus tôt, des dizaines attaquent la voiture d’un représentant musulman ; ailleurs, 1 000 manifestent « devant le ministère des Affaires étrangères et les locaux de la télévision d’Etat, perturbant la circulation et endommageant une dizaine de voitures »

Lundi 3 janvier

Le Caire : dans un quartier chrétien, manifestation de milliers dans la soirée, affrontements avec les flics

Mercredi 12 janvier

Le Caire : dans le quartier d’Al-Warraq, affrontements entre protestataires et flics devant le commissariat après un début de mutinerie et un incendie, renforts policiers

Mardi 25 janvier

Appel à manifester ce jour, lancé sur Internet depuis le week-end de la chute de Ben Ali, par des groupes militant pour la démocratie, notamment le Mouvement du 6 avril, pour des « réformes politiques et sociales » mais intitulé sur Facebook « jour de révolution/révolte contre la torture, la pauvreté, la corruption et le chômage », « day of wrath »

Manifestations, parfois de milliers, voire dizaines de milliers (50 000 pour tout le pays), dans de nombreuses villes : Le Caire, Alexandrie, Suez, Assiout, Assouan, nord du Sinaï, Ismaïliya (seulement centaines ou 2 000, selon sources), Mahalla (3 000), Tanta, Mansourah…

A Suez, manifestation de milliers, tirs des flics, affrontements, 3 morts (dont un, blessé ce jour, qui succombe à ses blessures le lendemain), peut-être 130 blessés

Au Caire, 15 000 manifestants pour 20 000 à 30 000 flics, ces derniers sont débordés, l’un d’entre eux est lynché par les manifestants ; les affrontements ont surtout lieu dans la nuit lors de la tentative d’évacuation de la place Tahrir au centre de la capitale, 250 blessés dont 85 flics ; 200 arrestations

Dans l’après-midi, blocage de Twitter durant plusieurs heures, blocage des principaux opérateurs de téléphonie mobile

En fin de journée, le ministre de l’intérieur appelle à mettre fin aux rassemblements et accuse les Frères musulmans d’être derrière les affrontements au Caire

Le Mouvement du 6 avril appelle à un deuxième jour de manifestation pour le lendemain et au rassemblement sur la place Tahrir au Caire

Mercredi 26 janvier

Important déploiement policier dans le centre du Caire dans le but d’empêcher les rassemblements désormais interdits, la place Tahrir a été évacuée au petit matin ; moins de manifestants (« milliers ») mais davantage de jeunes dans la rue que la veille, affrontements au cours de tentatives policières de disperser des rassemblements dans le centre-ville, attaque du ministère des affaires étrangères par des « dizaines » de protestataires dans la soirée entraînant de nouveaux heurts entre milliers de protestataires et flics qui tirent des balles en caoutchouc ; deux morts dont un flic pour la journée (renversés par une voiture pour l’un d’entre eux ?), dizaines de blessés

Pour tout le pays, plus de 500 arrestations depuis la veille (intensification de la répression), mention de casseurs de manif armés de bâtons et de couteaux : les baltaguias

Suez : manifestation de 2 000 qui grossit au fur-et-à-mesure de sa progression, poursuite des affrontements à l’issue des funérailles des tués de la veille ou parce que leurs corps n’ont pas été rendus, jets de pierres contre balles en caoutchouc, attaques à coups de cocktails Molotov de bâtiments gouvernementaux, du siège du PND et d’un poste de police (possible prise d’armes), pillages « signalés », plusieurs quartiers touchés, 70 à 90 blessés dont 15 flics

Appel lancé à manifester après la prière du vendredi suivant

Blocage de Facebook

Jeudi 27 janvier

Le Caire : forte présence policière, « situation relativement calme », possibles affrontements toutefois entre « activists » et flics dans la matinée (une seule source : Al Jazira),

Suez : dans la matinée, possible incendie d’un poste de police que les flics auraient juste le temps de fuir ; dans l’après-midi, manifestation sur une place du centre-ville, et devant un autre poste de police, pour exiger la libération des arrêtés des jours précédents (75 officiellement), reprise des affrontements ; pierres et cocktails molotov contre lacrymogènes, canon à eau et balles en caoutchouc ; incendie de voitures et d’une caserne de pompiers ; pillage de la coopérative (sorte de « supermarché gouvernemental avec des produits subventionnés ») et du siège d’une compagnie de tabac ; en fin de journée, des témoins mentionnent des échanges de tirs entre « forces de l’ordre et protestataires » au cours d’affrontements qui durent dans la soirée, incendie de la mairie et du siège du PND ; peut-être 1 mort voire une dizaine (Libération du 31), 87 flics blessés, peut-être 130 blessés, 300 arrestations (chiffre officieux) ; peu de détails, ville sous couvre-feu depuis la veille au moins, journalistes interdits d’y entrer, possibles coupures de l’électricité et des communications

Ismaïlia (au nord de Suez, 750 000 hab.) : affrontements, ou « accrochages », entre centaines de manifestants et flics, jets de pierres contre lacrymogènes, dizaines d’arrestations

Cheikh Zouwayed (Sinaï) : 1 tué par balles lors d’échanges de tirs entre « manifestants bédouins et forces de l’ordre », puis dans la soirée tirs de roquettes contre la police

Retour d’El Baradei dans le pays ; le PND se dit « ouvert au dialogue avec la jeunesse » ; les Frères musulmans annoncent dans la soirée leur participation à la journée de protestation du lendemain

Bilan officiel de 7 morts à ce jour, 1 000 à 1 200 arrestations

Dans la soirée, coupure totale d’Internet dans tout le pays 

Vendredi 28 janvier

A la coupure d’Internet s’ajoute celle du réseau GSM dans certaines zones « sélectionnées »

Manifestations dans plusieurs villes après la prière 

Le Caire :

Fin de matinée, premiers accrochages entre manifestants et flics à la sortie d’une mosquée ; en début d’après-midi, en dépit de l’important quadrillage policier, manifestations dans toute la ville aux cris de « à bas Moubarak », « le peuple veut la chute du régime », « Moubarak dégage », « liberté » ; Entre 120 et 150 000 personnes d’après Libération, certainement bien davantage, par cortèges de centaines et de milliers qui se dispersent puis se reforment et tentent, malgré la très grande présence policière, de faire jonction dans le centre ; affrontements, canons à eau, tirs tendus de lacrymos et de balles en caoutchouc contre pluie de projectiles de toutes sortes ; sur le pont reliant l’opéra à Tahrir, une foule de dizaines de milliers s’affronte aux flics, tirs à balles réelles ; au fil de la journée, les cordons de flics cèdent sous la pression du flot de manifestants (flics désarmés et tabassés), notamment au niveau d’un grand échangeur routier ; intenses combats de rue et charges policières ;

En milieu d’après-midi, assaut et incendie contre plusieurs commissariats ; des flics de base changeraient de camp dans les quartiers de Boulaq et Abou El Ela ; en fin d’après-midi l’armée, appelée en renfort par le pouvoir, commence à se déployer dans les zones sensibles du Caire, sans toutefois stopper l’émeute ni intervenir directement contre elle, qui se poursuit alors ; cocktails Molotov contre voitures, camions et blindés de flics (nombreux véhicules policiers brûlés) dans plusieurs quartiers du centre dont la place Tahrir où les affrontements seraient les plus violents ; en fin de journée, pillage et incendie de l’immeuble du PND près du musée ; le bâtiment de la radio-télévision d’État est pris d’assaut (et envahi apparemment ou protégé par militaires qui dispersent les assaillants) comme celui du ministère des affaires étrangères ; incendie de plusieurs bâtiments officiels dans les quartiers de Garden City et du Parlement ;

Dans la soirée, tanks salués par la foule, début de liesse et « communion » manifestants/militaires, des flics se rallieraient également aux manifestants ; saccages de « dizaines de boutiques » ; début de soirée : échange de tirs « intenses » dans le quartier des ministères ; d’après certains témoignages, les affrontements contre les flics pourraient durer jusque dans la nuit (lacrymos et balles réelles des flics contre révoltés plus nombreux), dizaines de véhicules de police brûlés à Gizeh ; certaines articles parlent de la disparition des flics en début de soirée ; dans la nuit, des centaines de manifestants occupent à nouveau la place Tahrir, poursuite d’affrontements ; officiellement alors au moins 5 morts pour la journée (plusieurs dizaines de tués selon bilans officieux, 30 cadavres à la morgue), 870 blessés ;

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Alexandrie :

Fin de matinée, tentative policière de dispersion de la manifestation de 1 000 à 5 000 personnes (dizaines de milliers ensuite peut-être jusqu’à 100 000 manifestants pour toute la ville selon journal d’opposition, ceci plus sûrement en fin de journée après la défaite policière) , possibles attaques policières dès la sortie des mosquées pour empêcher les rassemblements, puis en milieu d’après-midi, affrontements avec les flics, les « manifestants » dont le nombre ne cesse de grossir prennent le dessus, attaquent et incendient le gouvernorat et le siège du PND ; dans un autre quartier du centre-ville, assaut contre un commissariat, incendie de véhicules de police ; battus dans les affrontements par des émeutiers beaucoup plus nombreux qui tiennent la plupart des rues, les flics battent en retraite, disparaissent, se rallient ou sont délestés de leur équipement et battus avec leur propres matraques, situation similaire dans tous les quartiers : victoire contre la police, plusieurs commissariats en feu ; les militaires se déploient ; Al Jazira parle de 20 morts

Suez :

Manifestation en début d’après-midi, 2 000 à 5 000 participants (nombre qui augmente par la suite, peut-être 50 000 à 70 000 voire plus), affrontements avec les flics en milieu d’après-midi, assaut de milliers contre l’un des commissariats principaux (« District 40 », Arba’in), pillé, saccagé et brûlé, tabassage des flics et libération des prisonniers, prise des armes ; un deuxième commissariat est pris peu après ; d’après Libération du 31 janvier confirmé par d’autres articles plus tard, renforts policiers avec l’arrivée de mercenaires armés (« baltaguias ») pour le compte d’un businessman de la ville qui fait dans la concession automobile, tirs contre manifestants et ambulances ; colère de la foule, destruction de commerces, de banques, d’opérateurs téléphoniques et des concessions automobiles du petit potentat obligé de fuir la ville qu’en fin d’après-midi les flics abandonneraient à leur tour non sans avoir d’abord relâchée des « délinquants armés » ; les militaires entrent dans la ville en fin d’après-midi (blindés) ; toutefois, encore des affrontements avec les flics en début de soirée d’après Al Jazira ; 11 à 18 morts (« dont des criminels tués par la population » d’après Libération du 31), 170 blessés ;

En milieu d’après-midi, annonce de l’instauration d’un couvre-feu dans ces 3 villes mais respecté nulle part, couvre-feu étendu à tout le pays quelques heures plus tard, extension démentie dans la soirée ;

Mansourah (nord-est, 480 000 hab) : centaines puis « dizaines de milliers » (40 000, chiffre officieux) manifestent, tentative policière de les disperser, attaques de bâtiments officiels dont les bureaux du PND, « prise de contrôle » de commissariats, 2 morts

Ismaïlia : manifestation de milliers, saccage du siège du PND

Région du Delta du Nil : « dizaines de milliers » de manifestants à travers la province, heurts avec les flics, par endroits incendies des sièges du PND

Damiette (Delta du Nil, 1 000 000 hab) : milliers voire dizaines de milliers de manifestants, incendie du siège du PND

Port Saïd (nord-est, 600 000 hab) : dizaines de milliers de manifestants, peut-être 80 000, 1 mort (source officieuse)

Beni Soueif (100 km au sud du Caire) : manifestation de 50 000 (officieux)

Louxor (sud, 430 000 hab) : manifestation de 15 000, « heurts »

Tanta : manifestation de 50 000, blocage d’une des principales routes

Kafr al-Dawwar : manifestation de 25 000

Possibles « clashes » au cours de manifestations à Assiout, Al-Minya, al-Arish

Gouvernorat d’Ach-Charqiya : manifestation de milliers, possibles affrontements

Bilan global pour ce jour : 74 à 100 morts et 2 000 blessés (établi le lendemain), bilan minimal

A minuit, allocution télévisée de Moubarak qui annonce la démission du gouvernement et de « nouvelles mesures pour la démocratie »

Dans la nuit, le musée du Caire est partiellement vandalisé

Samedi 29 janvier

Manifestations de dizaines de milliers au Caire, Alexandrie, Suez et Ismaïlia, couvre-feu non respecté

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Le Caire : armée massivement déployée ; dans la matinée, la place Tahrir est toujours occupée par quelques centaines de protestataires ; à proximité de Tahrir, les flics tirent encore des lacrymos sur les manifestants, voire des balles réelles ou en caoutchouc ; malgré les appels de l’armée à ne pas manifester et à respecter le couvre feu, les manifestants reprennent les rues ; des milliers puis dizaines de milliers de personnes (50 000 puis 100 000 voire plus) sur la place Tahrir encadrées par les chars de l’armée (fraternisation, pancartes et banderoles), appel au départ de Moubarak, absence de la police ; en milieu d’après-midi, affrontements entre un millier de manifestants et flics au cours d’un assaut sur le ministère de l’intérieur, « bataille rangée » durant plusieurs heures, tirs à balles réelles des flics, 3 à 5 insurgés sont tués (3) ; la tentative de prendre le bâtiment pourrait durer jusque dans la matinée du lendemain

Nombreux pillages (« widespread looting ») signalés à Maadi (banlieue sud), Gizeh et ailleurs : supermarchés (un Carrefour notamment dans la matinée) et autre commerces, night-clubs, casinos, zones résidentielles, banques, fast-foods, cabarets (commencés dans la nuit précédente), poursuite des pillages dans la nuit de ce jour au lendemain : « magasins, maisons, banques et bâtiments officiels », un centre-commercial vidé et brûlé ; attaque des quartiers résidentiels par des « groupes de jeunes » qui s’en prennent aux luxueuses maisons

Au Caire, comme dans le reste du pays apparemment, la plupart des policiers ont disparu depuis la veille, tandis que de nombreux détenus auraient été libérés de plusieurs prisons par le régime ; eux et des milices et anciens flics effectueraient des raids « criminels » (tirs, pillages, saccages, incendies) : formation quartier par quartier de groupes d’auto-défense dans la soirée, particulièrement à Maadi, échange de tirs, patrouilles d’habitants armés (« clubs and chains », puis fusils de chasse et couteaux), barricades dans les rues pour empêcher l’accès aux quartiers ; patrouilles de l’armée dans la soirée pour prévenir les pillages contre les habitations ; dès le début de l’après-midi, l’armée a appelé les gens à se protéger eux-mêmes contre les pillages (4)

Prisons : A 13 h, « selon la BBC, des émeutes ont éclaté dans la prison d' Al-Minoufiyah au nord du Caire. Les forces de sécurité répondent par des tirs d'arme à feu. » ; en milieu d’après-midi, mention d’un incendie ou d’une mutinerie dans une prison proche du Caire (Abou Zaabal), 8 morts, 1223 blessés ; « La BBC en Arabe rapporte que des prisonniers politiques ont pris le contrôle de l'intérieur de la prison Abou Zaabal au Caire, mais que la police les empêche de s'enfuir. » ; dans la nuit du 29 au 30, tous les prisonniers de cette prison (Abou Zaabal) parviennent à s’évader après une « émeute » (14 morts dont deux flics)

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Alexandrie : manifestation moins importante que celle de la veille, mais peut-être dizaines de milliers tout de même, encore des affrontements entre milliers de manifestants et flics (certains sont donc toujours là), mention de tirs à balles réelles, plusieurs commissariats « en flammes », bilan officieux à ce jour pour cette ville : 36 tués ; probables pillages, création de comités « populaires » dans les quartiers

Rafah (frontière avec la bande de Gaza) : le siège de la sûreté d’Etat est attaqué par « un groupe de bédouins », 3 flics sont tués

Suez : décrite comme un champ de bataille, ville aux mains de ses habitants (et de l’armée surtout ?) ; les militaires tentent de faire respecter le couvre-feu mais se heurtent à la résistance des manifestants, tension au moins, possibles affrontements en fin de journée ; incendie de deux commissariats non loin de Suez, peut-être une dizaine de morts (dont des « délinquants libérés »)

Ismaïlia : manifestation et affrontements dès la matinée, attaque du siège de la Sûreté de l’État par « des dizaines de milliers de manifestants », 5 morts

Gouvernorat de Beni Soueif : à Bida, affrontements, attaque d’un commissariat, 12 morts ; à Nasser, attaque d’un commissariat, 5 morts

Louxor : siège du PND brûlé, l’armée entre dans la ville

En fin d’après-midi, nomination d’un vice-président, Omar Souleiman, et du nouveau premier ministre Ahmad Chafik (deux militaires proches de Moubarak donc) ; fuite à Londres des fils Moubarak

A ce jour, d’après les services de sécurité, « 60% des postes de police du pays ont été incendiés, dont 17 au Caire »

Possibles pillages généralisés dans plusieurs villes

Dimanche 30 janvier

Selon source étatique, dans la nuit de la veille à ce jour, des milliers de détenus parviennent à s’évader de la prison de Wadi Natroun (située entre Le Caire et Alexandrie) après une « émeute » durant laquelle ils auraient pris le contrôle après s’être emparés des armes ; même type d’évasions dans trois autres prisons dont celle de Tora apparemment ; des groupes armés auraient pris d’assaut les prisons pour libérer les prisonniers, longues fusillades ; mention de tirs dans le quartier de la prison d’Abou Zaabal dans l’après-midi ; d’autres sources attribuent les évasions à des provocateurs de la « police secrète » qui libéreraient volontairement les prisonniers, ou laisseraient faire

Le Caire : après les pillages de la nuit, comités de quartiers pour l’autodéfense au Caire (comités de village ailleurs), barricades ; place Tahrir occupée en permanence et noire de monde dès le début de l’après-midi, autant de manifestants que la veille mais ambiance plus tendue ce jour, renforts militaires, avions de chasse qui survolent la place à basse altitude, mais non-respect du couvre-feu ; en fin d’après-midi, El Baradei s’y adresse à la foule ; dans la nuit, plusieurs centaines à 2 000 restent sur la place, début de campement, tous âges, tous sexes, enfants, « conversations », « tribuns »

Suez : « l’armée reprend le contrôle de la ville », manifestation, couvre-feu respecté

Mansourah : dizaines de milliers de manifestants

Alexandrie : manifestation, non-respect du couvre-feu

Damanhour (Delta) : milliers de manifestants

Mahalla : manifestation « importante »

Ismailia : manifestation « importante »

« Pillages signalés dans la plupart des grandes villes » (plutôt la veille et dans la nuit)

Interdiction d’Al Jazira

Annonce étatique d’un retour de la police le lendemain et de l’allongement du couvre-feu d’une heure (début à 15h au lieu de 16h)

El Baradei chargé de négocier avec le pouvoir (armée) au nom de toute l’opposition (Frères musulmans compris)

Bilan des morts à ce jour : 102 à 150

Lundi 31 janvier

Appel à la grève générale lancé en début de matinée par coalition d’opposants, « plus ou moins suivi », commerces fermés depuis le 28, entreprises « au ralenti »

Le Caire : place Tahrir toujours occupée (100 000 personnes peut-être qui demandent à l’armée de choisir : « le peuple ou Moubarak », voire 250 000 selon Al Jazira), de plus en plus de banderoles et de pancartes pour exiger le départ de Moubarak ; auto-organisation (« forum permanent ») de la place ; armée cantonnée aux abords de la place, plus de proximité avec occupants ; début du redéploiement des policiers par endroits, peut-être dès la soirée de la veille ; ce jour, ils sont encerclés par les manifestants à proximité de la place Tahrir et quittent le lieu ; nouvelle violation du couvre-feu ; en fin de journée, dans un communiqué lu à la télévision, l’armée annonce qu’elle n’emploiera pas la force contre les manifestants dont les revendications sont « légitimes » ; dans la soirée, elle déroule des barbelés à certaines entrées de la place et renforce la protection des bâtiments de la télévision nationale et de l’ambassade américaine

Appel lancé par les « groupes d’opposants » (mouvement du 6 avril et autres « collectifs de jeunes », rejoints par les Frères musulmans notamment, qui appellent à manifester « jusqu’à la chute du régime ») à une manifestation d’un million de personnes pour le lendemain au Caire et à Alexandrie

Alexandrie : manifestation de centaines

Annonce de la formation du nouveau gouvernement, nomination d’un nouveau ministre de l’Intérieur et remplacement des ministres issus « du milieu des affaires », sinon reconduction de la plupart des anciens, le ministre de la Défense Tantaoui est nommé vice-premier ministre ; dans la soirée, intervention télévisée de Souleiman annonçant un dialogue avec tous les partis politiques pour des réformes constitutionnelles et législatives ; arrêt de la circulation ferroviaire

Mardi 1er février (« Marche du million »)

Grève générale ; l’armée bloque les accès au Caire et l’autoroute entre Le Caire et Alexandrie à un kilomètre de la capitale, autres routes coupées entre les principales villes, pas de trains, pas de transports en commun

Le Caire : place Tahrir toujours occupée ; 5 000 personnes le matin puis progressivement entre 500 000 et 2 millions, voire plus (variable suivant les sources) sur la place et dans les rues environnantes à l’appel du Mouvement du 6 avril relayé pour la première fois par les Frères musulmans ; « mobilisation/phénomène de masse » ; campement ; distractions ; rassemblement de quelques centaines de partisans de Moubarak (place Taalat Hard ?) ; dans la nuit, possibles affrontements entre des milliers « d’hommes de main du régime », se dirigeant vers le centre-ville, et les comités de quartiers

Alexandrie : rassemblement de dizaines de milliers puis de centaines de milliers dans le calme, peut-être un million

Suez, Mansourah, Louxor, Assiout : rassemblements de milliers

Al Jazira parle de 8 millions de manifestants pour tout le pays

International : flambée des cours du pétrole

Bilan onusien à ce jour : 300 morts

23 H : discours de Moubarak à la TV, qui annonce qu’il ne se représentera pas à l’élection présidentielle de septembre, mais refuse de quitter le pouvoir

Mercredi 2 février

Le Caire :

Matin 

Plusieurs milliers ont passé la nuit sur la place Tahrir

Fin de matinée : rassemblement d’une centaine de « pro-Moubarak » sur la place Taalat Hard, possibles flics en civil emmenés sur place par taxis et bus d’après certains Cairotes ; Al Jazira parle d’un rassemblement de 10 000 dans le centre-ville, 500 pour le Nouvel Observateur

Communiqué télévisé de l’armée appelant les manifestants à rentrer chez eux pour « permettre le retour de la stabilité et de la sécurité »

Accès Internet partiellement rétabli et allègement du couvre-feu (dorénavant de 17h à 7h)

Après-midi

13 h : arrivée des dits pro-Moubarak (plusieurs centaines) aux abords et sur la place Tahrir, premiers affrontements avec les milliers de protestataires

Bataille rangée pour la place durant des heures (bagarres, pierres, bâtons, barres de fer, couteaux, cocktails molotov, armes à feu, rues « dépavées ») ; lynchages de partisans de Moubarak qui se révèlent être des flics (carte professionnelle trouvée sur eux) ; « pro-Moubarak » attaquent à dos de chevaux et de chameaux ; pas d’intervention de l’armée sinon des tirs de semonce, possible retrait à l’écart des affrontements ; attaques contre les journalistes (de la part des « pro-Moubarak ») (6) et arrestations de correspondants étrangers (flics en civils et baltaguias donc) ; (7)

16 h 30 : des centaines de blessés à cette heure ; début des attaques à partir des toits des immeubles par des « partisans de Moubarak », jets de blocs de pierres

Ouverture de plusieurs fronts aux entrées de la place, échanges de cocktails Molotov

Officiellement, 1 mort au moins (un soldat) ; centaines de blessés, au moins 500

18 h 30 : musée en feu

Possible caillassage des tanks de l’armée par les « pro-Moubarak », les militaires pourraient alors tenté d’établir un périmètre de sécurité en déployant des chars autour de la place et en tirant des rafales en l’air

20 h 45 : Souleiman appelle à la fin des manifestations et au respect du couvre-feu

22 h : coups de feu sur la place, tirs d’armes automatiques (3 morts ?)

23 h : début de retraite des « pro-Moubarak », avancée des protestataires derrière des boucliers de fortune et des barricades en métal ; les affrontements se déplacent aux rues et places alentour

Poursuite des affrontements toute la nuit, guérilla de position

Bilan : 3 à 4 morts (à revoir à la hausse), 750 blessés

Alexandrie : dans la nuit de la veille à ce jour, affrontement entre « pro-Moubarak » et protestataires, tirs de semonce de l’armée qui se retirerait, possibles tirs contre les manifestants par des « hommes de main du régime »

Suez : « Le scénario à Suez est "le même qu'au Caire, mais avec une intensité et une violence beaucoup moins fortes", rapporte l'envoyé spécial du Monde. "L'armée tient jusqu'à présent la situation. Tout a été fait par les militaires pour éviter toute confrontation entre les militants des deux bords. Pour l'instant, l'ordre public est maintenu, mais c'est un ordre très fragile, très précaire", souligne le journaliste. »

Jeudi 3 février

Le Caire :

Matin

Petit matin (4 /5H) : déploiement de véhicules militaires sur la place Tahrir ; plusieurs morts par balles (4 morts, tirs des « pro-Moubarak »), sur la place et près du pont du 6 Octobre ; 7 à 13 morts, 600 à 2 000 blessés au moins depuis la veille ; toujours des milliers de protestataires sur la place (centaines pour d’autres sources), en surnombre par rapport aux « pro-Moubarak »

Détails sur l’organisation de défense de la place : barricades à tous les accès (« plusieurs lignes de défense »), réserves de projectiles, signaux d’alerte en tapant sur les barrières métalliques, petite mosquée changée en hôpital de fortune, chasse aux flics infiltrés, casques récupérés sur des chantiers (8)

Les militaires procèdent à des arrestations (gens livrés comme la veille par les protestataires et sur lesquels ils ont trouvé la carte professionnelle les identifiant comme appartenant à la sécurité) ; l’armée se redéploie dans la matinée tentant de créer une zone tampon ; les chars feraient reculer les « pro-Moubarak »

10 H : la télévision d’État annonce le début d’un dialogue entre Souleiman et «les partis politiques et les forces nationales»

Chasse aux journalistes étrangers par les « pro-Moubarak », tabassage, arrestations ; centaines (moins nombreux que la veille) de pro-Mouabarak, surtout sur la place Talaat Harb où ils érigent des barricades, et près du musée, véritable front des affrontements les plus forts

Après-midi

Début d’après-midi : « tirs nourris » aux abords de Tahrir, possiblement de l’armée

Milieu d’après-midi : lors d’une conférence de presse télévisée, excuses publiques du premier ministre pour les violences (9), qui se dit prêt à venir sur la place pour dialoguer avec les manifestants ; offre rejetée dans la foulée par les « groupes de jeunes pro-démocratie »

Malgré l’interposition de l’armée, les affrontements se poursuivent à coups de jets de pierres et de cocktails, possibles tirs à balles réelles des « pro-Moubarak », les « anti » pourraient reprendre alors la place Talaat Harb

Fin d’après-midi : brève percée des « pro-Moubarak » à travers le cordon militaire, nouveaux affrontements sur la place, jets de cocktails Molotov, coups de feu ; incendie d’un supermarché en banlieue ; à la télévision nationale, Omar Souleiman dénonce un complot à l’origine des violences (« l'appel au départ du président Moubarak est un "appel au chaos" »), désigne également les Frères musulmans, et annonce la libération des détenus qui n’ont pas commis des actes de violence

En fin de journée ou dès le milieu de l’après-midi, les protestataires reprennent du terrain sur les « pro-moubarak »/baltaguias qui, toute la journée, ont empêché les gens de rejoindre la place (des taxis servent à les amener et à arrêter/enlever protestataires et journalistes)

20 H : les affrontements baissent d’intensité, une heure auparavant l’armée aurait à nouveau tenté de séparer les deux camps en se déployant sur la place

Alexandrie : en fin de journée, des centaines de milliers de manifestants bravent le couvre-feu

Apparition TV (chaîne américaine ABC) de Moubarak disant qu’il ne peut quitter le pouvoir, et que les Frères musulmans sont responsables des violences (10)

Vendredi 4 février

Le Caire :

Possiblement 4 nouveaux tués par balles dans la nuit, peut-être par des snipers

Matin

Renforts militaires sur et aux abords de la place Tahrir

8h45 : 3 000 à 4 000 protestataires sur la place

10 h : visite et prise de parole de Tantaoui (ministre de la Défense) sur la place pour demander aux manifestants de rentrer chez eux

11 h : 5 000 à 10 000 manifestants ; grande prière du vendredi sur la place

De plus en plus de monde au fil de la journée (peut-être 100 000 au total), les affrontements ont désormais lieu à sa périphérie

Négociations entre US et gouvernement (11)

Après-midi

13 H : 3 000 « pro-Moubarak » manifestent dans un quartier de Gizeh

14 H : affrontements place Talaat Harb (occupée par les baltaguias), durent une bonne partie de l’après-midi

Milieu d’après-midi : quelques centaines de « pro-Moubarak » sur le pont du 6 Octobre

16 H : liesse à Tahrir, peut-être consécutive à l’annonce d’une marche sur le palais présidentiel

Couvre-feu non respecté

Alexandrie : dizaines de milliers de manifestants dont beaucoup de Frères musulmans apparemment, couvre-feu non respecté

El Arish (près de la frontière avec la bande de Gaza) : dans la matinée, tir d’une roquette contre le siège de la sécurité

Manifestations dans la plupart des villes égyptiennes :

« Selon le site du quotidien égyptien Al Masry Al Youm (le premier quotidien indépendant), des manifestations ont lieu dans 28 des 29 gouvernorats d'Egypte. C'est notamment le cas dans les villes de Zagazig, Sharqiya, Minoufiya. A Louxor, à 700 km au Sud du Caire, ils seraient 20.000 selon le site. »

Arrestation d’Habib El-Adli

Samedi 5 février

Explosion d’un gazoduc, ou d’un terminal gazier, dans le Sinaï (affrontements armés les jours suivants)

Démission du bureau exécutif du PND (dont Gamal, et surtout Hosni lui-même qui le dirigeait jusqu’alors)

Place Tahrir toujours occupée, malgré l’intervention d’un responsable militaire ce jour exhortant les occupants à quitter la place

Dimanche 6 février

Annonce d’un dialogue des Frères musulmans avec le pouvoir (Souleiman)

Nouveaux renforts militaires place Tahrir, toujours occupée, et aux alentours

Manifestations dans plusieurs villes, dont Mansoura (milliers)

Fin d’après-midi : annonce de la formation d’une coalition des protestataires qui assure qu’elle ne quittera pas la place tant que Moubarak n’aura pas démissionné (12)

Lundi 7 février

Réduction du couvre-feu d’une heure

Rafah : tirs de roquettes sur une caserne de la police

Libération d’un « cyberdissident » (chef marketing chez Google) ; interview télévisée

Annonce d’une augmentation des salaires des fonctionnaires et des retraites des civils et des militaires

Mardi 8 février

Toujours des milliers à occuper Tahrir, malgré le froid

Moubarak forme une commission pour amender la constitution

Centaines de milliers de manifestants au Caire (« manifestations les plus importantes depuis le début du mouvement ») ; les « indécis » rejoindraient la contestation (13), apparition d’anciens pro-Moubarak dans les rangs des protestataires (14) ; les rassemblements s’étendent désormais vers d’autres lieux du pouvoir (assemblée/parlement, ministère de l’Intérieur…)

Manifestation de milliers à Alexandrie, Minya, Sohag et Assiout (notamment ; mais peu de choses sont dites sur la province ; un blogueur de Libération laisse entendre que la répression policière y serait sanglante, possibles affrontements à Alexandrie)

Manifestations avec « revendications sociales » dans les arsenaux de Port Saïd ; grève à Mahallah et dans une société gazière du Fayyoum ; les grèves commencent dans certains secteurs (15)

Dans la soirée, tirs des flics sur les manifestants du gouvernorat de Wadi el Guedid (ville d’El Kharga, Haute Egypte) ; idem à Assiout où les tirs à l’arme automatique feraient 8 morts

Mercredi 9 février

Le matin, déclaration de Souleiman à la TV qui exige que la « crise » s’achève, et menace du risque d’un coup d’Etat

Confirmation, mais toujours par le même blogueur, de fortes menées répressives dans les villes de province ce jour et la veille, alors que les flics sont quasi absents de la capitale (Mahallah, Suez, Tanta, assauts de baltaguias dans ces dernières) ;

Poursuite d’affrontements commencés la veille entre 3 000 manifestants et flics à El Kharga (oasis), tirs à balles réelles, colère : incendie de deux commissariats, du tribunal et du siège du PND (7 bâtiments officiels au total) ; 3 à 5 morts (atteints par des balles ; tirs déclencheurs de l’émeute), 100 blessés

A Ismaïlia, des habitants d’un bidonville saccagent un bâtiment gouvernemental et incendient la voiture du gouverneur, absence de police

A Assouan, ce jour ou la veille, 5 000 chômeurs saccagent le bâtiment gouvernemental

Au Caire, toujours des milliers de manifestants ; des centaines d’entre eux tentent de bloquer l’accès au parlement et au siège du gouvernement pour empêcher les membres du PND d’entrer

Jeudi 10 février

Multiplication des grèves dans plusieurs secteurs et plusieurs villes

A Port-Saïd, 3 000 habitants des bidonvilles (Ashwayet) saccagent le siège de la police (ce jour ou la veille) après avoir fait de même la veille avec celui du gouvernorat et incendié dans la nuit quatre autres bâtiments gouvernementaux

Presse étatique, télévision nationale et certains officiers de l’armée changent progressivement de camp

Nouvelle intervention télévisée de Moubarak pour assurer qu’il ne partira pas avant septembre mais transfère ses pouvoirs à Souleiman (colère place Tahrir, marche avortée sur la télévision d’État) ; le vice-président prend la parole dans la foulée pour appeler à la fin de la mobilisation

Vendredi 11 février (« jour décisif » ou « jour de l’adieu »)

Dès 9 h du matin, dizaines de milliers sur la place Tahrir et devant les sièges du pouvoir dont le palais présidentiel

10 H : communiqué de l’armée pour demander notamment la reprise du travail (mal reçu par les manifestants lorsqu’il est lu en début d’après-midi à Tahrir, devant le palais présidentiel plutôt ?)

Toujours dans la matinée, des insurgés auraient pris le contrôle de plusieurs bâtiments gouvernementaux à Suez

13 H 30 : annonce du départ de Moubarak de la capitale

Manifestations de milliers à Suez, Mahalla, Tanta, Ismailia et d’autres encore

Centaines de milliers sur la place Tahrir, dont des milliers se dirigent vers le palais présidentiel (et siège de la télévision d’État) vers 14 H 30

16 H 30 : « Echange de tirs signalés à Al-Arish dans le Sinaï entre manifestants et policiers. Un millier de manifestants ont lancé des bombes incendiaires sur un poste de police et mis le feu à des véhicules. Il y aurait plusieurs blessés. »

17H : Souleiman annonce la démission de Moubarak et la remise du pouvoir à l’armée

Liesse place Tahrir

« 18h51 Devant le palais présidentiel au Caire, le ministre égyptien de la Défense Mohamed Hussein Tantaoui, salue la foule célébrant le départ du président Hosni Moubarak sous la pression de la rue. »

Samedi 12 février

Fête toute la nuit à Tahrir, foule dans toutes les rues ; l’armée déblaye les barricades au petit matin

(16)

Le PM annonce ses priorités, notamment au sujet des 13 000 évadés des prisons qui seraient toujours dehors, alors que le jour même 600 se font la belle d’une prison du Caire

« 13 heures. Manif de policiers. Des centaines de policiers égyptiens manifestent à Ismaïliya, grande ville située sur le canal de Suez, pour protester contre la corruption dans leurs rangs. Ils accusent leurs supérieurs de leur avoir donné l’ordre de tirer sur les manifestants. «Nous sommes avec le peuple. La violence, ce n’était pas de notre faute», scandent-ils. »

(17)

Dimanche 13 février

Plus que quelques centaines à Tahrir où la circulation a repris ; « échauffourées » entre soldats et « dizaines de protestataires irréductibles »

13 H : manifestation de 400 policiers « pour leur honneur » ; « Ils réclament aussi des hausses de salaires et l'exécution de leur ancien ministre, Habib el-Adli, révoqué fin janvier sous la pression de la rue. Des incidents ont lieu avec les soldats présents, qui tirent des coups de semonce en l'air. »

(18)

Rencontre entre officiers et membres du 6 Avril

Lundi 14 février

Poursuite et extension des « mouvements sociaux » (19) ; l’armée appelle à la fin des grèves ; manifestations de milliers d’employés de l’État, secteur par secteur ;

Ce jour ou la veille, attaque du siège de la télévision d’État par des centaines, jets de pierres

Mardi 15 février

Jour férié

Mercredi 16 février

Reprise des grèves pour demander des augmentations de salaire au Caire, à Alexandrie, dans les villes le long du canal de Suez

Vendredi 18 février

Le Caire : manifestation de milliers sur la place Tahrir entourée par l’armée, pour célébrer la « victoire »

Mardi 22 février

Remaniement ministériel, 3 ministres de Moubarak restent en poste :

« Nommés par l'ex-président Moubarak avant sa chute, le ministre des affaires étrangères Ahmed Aboul Gheit, celui de l'intérieur Mahmoud Wagdi et celui des finances Samir Radwane restent à leur poste. Le maréchal Hussein Tantaoui, à la tête du Conseil suprême des forces armées, à qui le président Hosni Moubarak a remis ses pouvoirs en démissionnant le 11 février après dix-huit jours de révolte populaire, reste ministre de la défense. »

Plusieurs manifs place Tahrir dont une de flics qui exigeraient leur réintégration (peut-être ce jour, ces derniers jettent des cocktails molotov sur le bâtiment du ministère de l’intérieur et l’incendient)

« Des documents auraient, dit-on, été «opportunément détruits». »

Jeudi 24 février

« Jeudi, au sud du Caire, cette défiance a dégénéré en émeutes quand un policier a tiré sur un chauffeur de minibus. Lynché par la foule qui a aussi incendié des véhicules, le policier est à l’hôpital, dans un état sérieux. Mais, dans les zones populaires, on rapporte aussi des règlements de compte entre civils, terminés à coup de machette ou de sabre : pendant l’absence de la police, les comités d’autodéfense des quartiers avaient amené la population à s’armer. »

Vendredi 25 février

Le Caire : manifestation de dizaines de milliers place Tahrir « to keep up the pressure on Egypt’s military-led transitional government », multiples revendications concernant la libération des prisonniers politiques, la démission des ministres Moubarak dont le premier ministre (Ahmed Chafik), l’abrogation de la loi d’urgence qui a cours depuis 30 ans ; dans la nuit, brutale dispersion par l’armée

Samedi 26 février

Au matin, excuses publiques de l’armée pour la répression de la veille

Dimanche 27 février

Rencontre entre opposants et militaires

Mercredi 2 mars

Débat télévisé au cours duquel le premier ministre Chafik est « malmené » par ses interlocuteurs pour sa participation à l’ancien régime

Jeudi 3 mars

Nomination d’un nouveau premier ministre (Essam Sharaf, ancien ministre de Moubarak entre 2004 et 2005, qui a participé à la contestation contre ce dernier place Tahrir) par le conseil suprême des armées ; nomination approuvée par El-Baradei

Vendredi 4 mars

Annonce de la tenue d’un référendum sur les amendements de la constitution pour le 19 mars

Le Caire : le nouveau PM s’adresse à des milliers (10 000) de manifestants sur la place Tahrir, qui l’interrompt « constamment », et où est surtout célébrée la démission de Chafik ; quelques manifestants tentent de se rendre au siège de la sécurité mais sont bloqués par les militaires

Alexandrie : à la tombée de la nuit, des centaines de manifestants (peut-être jusqu’à 1 000), qui réclament le démantèlement de l’agence de sécurité d’État, tentent de prendre d’assaut le bâtiment des services de sécurité, jets de pierres et de cocktails Molotov, incendie de voitures de flics, tirs des flics, 3 blessés par balles et 20 officiers des forces de sécurité tabassés ; l’armée en renfort parvient à reprendre le contrôle du bâtiment après qu’il a été envahi par les protestataires qui s’y battaient avec les employés

Soul (village au nord du Caire) : violences entre « musulmans et chrétiens », 2 morts

Samedi 5 mars

Cheikh Zayed (banlieue du Caire) : des centaines tentent de prendre d’assaut les bâtiments de la sécurité d’État, intervention de l’armée, les flics à l’intérieur brûleraient à la hâte des documents

Nasr City (Le Caire) : 2 500 manifestants s’emparent des bâtiments de la sécurité d’État et mettent la main sur des documents officiels

Marsa Matrouh (nord-ouest de la capitale) : un groupe de manifestants parvient à entrer dans le siège de la sécurité, prennent les documents, et mettraient le feu au bâtiment (doutes sur l’origine de l’incendie)

Zagazig (Delta) : attaque des bureaux de la sécurité d’État

Fayoum (sud du Caire) : mêmes types de faits

Chibine al-Kom (Delta) : mêmes types de faits

“Protesters stormed inside at least six of the buildings, including the agency's main headquarters in Cairo's northern Nasr City neighbourhood, confronting officers face-to-face and attacking some in a surreal reversal of roles.”

Soul : incendie d’une église (20)

Lundi 7 mars

Le nouveau gouvernement prête serment

Mardi 8 mars

Le Caire : protestation de chrétiens coptes contre l’incendie de l’église à Soul ; dans la soirée, « affrontements » entre coptes et musulmans dans le quartier « pauvre » de Moqattam après que les manifestants coptes sont attaqués par des « voyous et salafistes », tirs, cocktails molotov contre les habitations, incendie d’ateliers et d’entrepôts, 10 à 13 morts, 110 blessés principalement coptes

Mercredi 9 mars

Le Caire : des contre-manifestants armés de couteaux et de machettes attaquent des manifestants sur la place Tahrir

Lundi 14 mars

La « coalition des jeunes de la révolution » appelle à voter non au référendum, même consigne de la part des deux candidats à la présidence El Baradei et Amr Moussa ; les Frères musulmans ont appelé à voter oui

« Le référendum prévoit d'amender la Constitution pour, notamment, limiter toute présidence à deux mandats de quatre ans -contre un nombre illimité de mandats de six ans actuellement- et assouplir les conditions de candidature. De nombreux partis et mouvements politiques ont jugé que ces amendements n'allaient pas assez loin, et que le référendum était organisé trop rapidement. »

Mardi 15 mars

Le ministère de l’intérieur annonce la suppression de la sécurité d’État, remplacée par une « nouvelle » institution : la Sécurité Nationale

Samedi 19 mars

Journée de vote (référendum)

El Baradei est caillassé à la sortie du bureau de vote

Dimanche 20 mars

Victoire du oui au référendum à près de 80 %

« En fin d’après-midi, seule Alexandrie votait majoritairement non. »

 

 

 

 

1.« Avec la nuit vient le chaos. Les jeunes de Shoubra et des autres bidonvilles se sont emparés des arsenaux de nombreux commissariats. Pillards et mendiants entrent dans le lobby de l’hôtel Ramses Hilton où se sont ­réfugiés les touristes, des dizaines de boutiques sont saccagées. »

2. « Les chants continuent. 2 camions blancs siglés « United Trans » entrent sur la place et sont repoussés par les manifestants qui craignent un coup fourré de la police. Un groupe se forme à l’entrée de la rue Talaat Harb. Au milieu, un homme barbu en djellaba, façon Frères Musulmans, tient un mégaphone et exhorte les foules à ne pas détruire les voitures de police. Un jeune homme de vingt ans se jette sur lui et l’insulte. « Va te faire foutre, enculé de ta mère. . infiltré ! allez ! sors ta carte du Parti National Démocratique ! » Nous les séparons. L’homme barbu s’éclipse, comme par enchantement. J’insiste sur cette scène en particulier, pour faire réfléchir ceux qui songent encore que la jeunesse égyptienne, excédée, étouffée, désireuse de vivre, danser, chanter, aimer ait quelqu’envie de se voir gouverner par les barbus. Précisions également que 65 % de la population égyptienne a moins de 18 ans (source : Ministère des affaires sociales 2009). »

3. « Symbole de l’appareil répressif policier, le ministère de l’Intérieur focalise, depuis longtemps, la colère des Egyptiens, terrifiés par la puissance aveugle d’Amn el-Merkazi, la fameuse sécurité centrale, forte de plus d’un million d’hommes et dirigée par le puissant Habib el-Adly, ministre de l’Intérieur. »

4. « Ces hommes de main, nous les connaissons aussi bien que nous connaissons Hosni Moubarak, on les appelle les Baltagueyya. Ce sont les mêmes qui sèment la terreur pendant les élections ou qui sèment le trouble lors de manifestations pacifiques. Ils sont payés par la caisse noire du Parti National Démocratique ou par les services de police. Le butin collecté s’ajoute à leur salaire. »

5.  « Selon le correspondant de l'AFP au Caire, la capitale égyptienne est méconnaissable en raison des incendies et des pillages »

6. « Les partisans de Moubarak sont pour beaucoup des policiers en civils, probablement envoyés par le pouvoir, et des Egyptiens pauvres payés pour venir se battre. Aux dires de témoins cairotes, ils sont arrivés par bus entiers ce matin. Sur les images, (voir ci-dessous), certains sont venus à cheval et même à dos de dromadaire place Tahrir. Armés de bâtons, ils jettent des pierres dans la foule, qui comprend des femmes et des enfants. Notre envoyé spécial, Luc Peillon, témoigne de scènes d'extrêmes violences. Notamment envers les photographes et les journalistes, visés par les pro-Moubarak. Certains sont tabassés, d'autres arrêtés. »

7.« Witnesses said the military allowed thousands of pro-Mubarak supporters, armed with sticks and knives, to enter the square. Opposition groups said Mubarak had sent in thugs to suppress anti-government protests. One of our correspondents said the army seemed to be standing by and facilitating the clashes.»

8. « Les campagnes de rumeurs et de désinformation sont continuellement nourries par la télévision d'état ou par des SMS envoyés à tous les abonnés Vodafone. Vers 1h00 du matin, on annonce aux Egyptiens dans leurs foyers que la place Tahrir a été vidée de ses manifestants et que la voirie est en train de la balayer. La télévision d'état explique ensuite que les manifestants sont des agents étrangers, entraînés par le Mossad et payés, chacun, 5000 dollars. »

9. « "Je n'ai pas assez de policiers. Lorsque l'armée est arrivée, beaucoup de policiers anti-émeutes sont rentrés dans leurs villages, ils sont partis et nous n'arrivons pas à les faire revenir", a déclaré le chef du gouvernement nommé le 29 janvier dernier. Il a par ailleurs annoncé que l'ancien ministre de l'Intérieur égyptien, Habib el-Adli, dont le départ avait été réclamé avec insistance par les manifestants, allait faire l'objet d'une enquête. Le parquet général a affirmé que d'anciens ministres et responsables égyptiens, dont Habib el-Adli et le magnat de l'acier Ahmad Ezz, ont été interdits de sortir du pays et leurs comptes ont été gelés. Le vice-président Omar Souleimane, cité par la télévision d'Etat, a pour sa part appelé à "la libération immédiate de jeunes détenus n'ayant pas commis d'actes criminels". Il a répété que ni le président Hosni Moubarak, ni son fils ne seront candidats à l'élection présidentielle prévue en septembre. »

10. « Dans la nuit. Les Etats-Unis discutent avec des responsables égyptiens des modalités d'un départ immédiat du président Hosni Moubarak et du transfert du pouvoir à un gouvernement de transition dirigé par le vice-président Omar Souleimane, rapporte le New York Times. Le quotidien américain cite des responsables de l'administration Obama et des diplomates arabes. Le projet est destiné à recueillir le soutien de l'armée égyptienne. Selon le journal, l'idée serait de former un gouvernement de transition auquel seraient invités à participer des groupes d'opposition, les Frères musulmans compris. »

11. « 11 heures. Une roquette antichar a été tirée sur le siège de la Sécurité de l’Etat dans la ville égyptienne d’El-Arich, près de la frontière de la bande de Gaza. »

« 11h36. Le guide des Frères musulmans, principale force d’opposition en Egypte, Mohamed Badie, a déclaré à la chaîne Al-Jezira qu’il était prêt au dialogue avec le vice-président Omar Souleimane mais après le départ du président Hosni Moubarak. »

12. « La coalition regroupe des représentants du Mouvement du 6 avril, du Groupe pour la justice et la liberté, de la «Campagne du porte-à-porte», de la «Campagne populaire de soutien à ElBaradei», des Frères musulmans et du Front démocratique. Elle réclame aussi la levée immédiate de l'état d'urgence, la dissolution du Parlement, la formation d'un gouvernement d'union nationale pour assurer une transition pacifique du pouvoir et organiser une réforme constitutionnelle. »

13. « Une scène provoque l'émoi général. Les appareils photos mitraillent. Une femme, une croix en or sur la poitrine, tient par l'épaule une femme en burqa. Emu, un homme se plante devant elles et dit: Je ne peux pas vous quitter des yeux! Je ne peux pas vous quitter des yeux! Un autre passe et crie à son tour: Ce sont eux qui nous divisent! Demain on saura qui a fait sauter l'église d'Alexandrie! 

Alors que le Caire, sous le regard de toutes les caméras, vit un moment de bonheur intense, les provinces, dont on parle peu, vivent une toute autre révolution.

Voilà deux jours qu'on entend parler d'une marche sur le Caire, en provenance de plusieurs villes de province: Mahallah, Alexandrie, Sohag, Suez… »

14. « Autre changement notable depuis hier: désormais l'on voit sur la place Tahrir d'anciens partisans de Moubarak, voire certains de ses propagandistes. C'est l'heure des opportunistes et des retournements de vestes. Le journaliste de télévision nationale, Amr Adib, s'est même vu refuser l'accès de la place: «Faut pas exagérer quand même», plaisante Ahmed. Le rédacteur en chef d'Al-Ahram, le principal quotidien gouvernemental, une quasi-institution d'Etat, a appelé à la démission de Moubarak lors d'une interview sur la BBC en arabe. Les ouvriers du goupe de presse pro-gouvernement Rose al-Youssef menacent de cesser le travail si la ligne éditoriale ne changeait pas. »

15. « Plus inquiétant encore que ce désaveu du plus haut juge du pays, des grèves commencent à gagner différents secteurs. On parle désormais d'un début de grève des employés du canal de Suez, ce qui porterait un coup fatal à l'économie du pays, déjà affectée par le crash de la saison touristique (1 million de touristes sont rentrés ces 3 dernières semaines) . «Vendredi, jure Mohamed, nous marcherons sur le palais présidentiel Ce sera le "jour de l'offensive". Il n'en a plus pour longtemps.» En fait, ce n'est plus seulement de Moubarak dont il est question maintenant, mais de tout le régime égyptien. »

16. « 7h30 «Le peuple a fait tomber le régime», «Les jeunes d'Egypte ont obligé Moubarak au départ», titre en une Al-Ahram, poids lourd de la presse gouvernementale, qui affiche d'ordinaire un soutien sans faille au régime.. »

17. « Le Conseil Supérieur des Forces Armées a fait plusieurs déclarations rassurantes: 

- interdiction faite à tous les anciens ministres de quitter le territoire national - la constitution actuelle est déclarée caduque et illégitime - l'Assemblée du Peuple va être dissoute - le Conseil d'Etat va être dissout - l'Equipe Gouvernementalle actuelle va être maintenue »

18.  « 15 heures. Le conseil suprême des forces armées, dans un communiqué lu par une présentatrice à la télévision d'Etat, annonce «la dissolution de l'Assemblée du Peuple et de la Choura», les deux chambres du Parlement largement dominé par des membres du Parti national démocrate (PND) de l'ex-président Moubarak. La dissolution du Parlement, après des élections l'an dernier accusées d'être marquées par une fraude massive, et la révision de la Constitution, accusée de limiter les conditions de candidature à la présidence, font partie des principales revendications des manifestants. Est aussi annoncée la «suspension de la Constitution» et la création d'une commission pour l'amender et organiser un référendum sur ces changements. Le conseil suprême, instance formée d'une vingtaine de généraux, ajoute qu'il «prend en charge la direction des affaires du pays provisoirement pendant six mois, ou jusqu'à la fin des élections législatives et pour la présidence de la République». »

19. « Des arrêts de travail et des manifestations ont lieu dans les transports, la banque, le pétrole, le textile et même des médias officiels et certains organismes gouvernementaux, pour demander des hausses de salaires et de meilleures conditions de travail, selon des sources syndicales et associatives. »

20. « Les violences ont été provoquées par une relation amoureuse entre un chrétien et une musulmane du gouvernorat de Helwan, au sud du Caire, qui a suscité l'ire de leurs familles. Dans ces violences, ce sont le père du chrétien et celui de la musulmane qui ont été tués, selon un responsable de la sécurité. Après les funérailles du père de l'Egyptienne, un groupe de musulmans s'est rendu à l'église du village et y a mis le feu. Le mariage entre un chrétien et une musulmane est illégal en Egypte, à moins qu'il ne se convertisse à l'islam. »

 

 

 

 

 

 

Hiver 2011, le commencement d'une époque